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Apports et limites méthodologiques du « raisonnement médical » d’Aaron V. Cicourel. Accorder ses violons en entretien avec des enquêtés aux profils sociaux contrastés
Abstract
The routine interview between a healthcare professional and a patient is at the heart of the collection of texts entitled ‘medical reasoning’. Aaron V. Cicourel deploys his precepts as an observer of language interactions and as a methodologist. We will compare his approach with our own experience, in the field of the social uses of the news media, in order to discuss the interviews (technical and contents), placing them in the context of observation scales in sociology.

Faire parler les enquêtés et veiller à bien se comprendre

Si les travaux d'Aaron V. Cicourel (1928-2023) sur le raisonnement (médical) comme phénomène social (Ogien, 2023) et le questionnement des pratiques informationnelles (médiatiques) n'offrent pas de liens évidents à première vue, il existe en fait des rapprochements méthodologiques et épistémologiques. En effet, l'investissement d'un terrain et l'ancrage dans un courant sociologique, souvent intimement liés, impliquent des options méthodologiques et théoriques qui contribuent à faire vivre la variété des échelles d'observation, lesquelles échelles sont complémentaires bien que perçues parfois comme exclusives. Aussi, les reconstitutions de maladie (anamnèse) ou de pratiques médiatiques passent nécessairement par des méthodes qui comportent leurs spécificités dont la plus commune est de reposer principalement sur le langage et ses ambiguïtés (Lahire, 1998). Et ce dans des échanges entre deux personnes ou plus aux statuts, rôles et bagages parfois très contrastés.

« Accorder ses violons » signifiera ici que l'exercice de l'entretien, limité dans son temps de réalisation, doit viser une entente réciproque entre médecin et patient (ou entre enquêteur et enquêté) quant à la manière de communiquer et quant au souci d'assurer une compréhension mutuelle des termes avancés. Il est donc question à la fois du rapport entre les propriétés sociales incorporées et contrastées des interlocuteurs (Boltanski, 1971, pp. 212-215), et des variations des niveaux de connaissances du domaine questionné (santé, actualités).

Sans prétendre être en mesure de convoquer l'ensemble des travaux d'Aaron V. Cicourel, lesquels offrent plusieurs facettes et séquences (ethnométhodologie, délinquance juvénile, langage, éducation, science cognitive, santé), mais aussi plusieurs réceptions -- que traitent d'autres intervenant-e-s des journées d'études --, et en évitant tout anachronisme, nous discuterons essentiellement les idées développées dans le recueil de textes issus des années 1980-1990, introduit par A. V. Cicourel et publié en 2001 sous le titre « Le raisonnement médical » (avec une préface de Pierre Bourdieu et Yves Winkin).

Convergences méthodologiques et épistémologiques

Des points de convergence peuvent être brossés à grands traits entre les préoccupations du chercheur étatsunien pour les entretiens médicaux et les entretiens que nous menons dans le cadre de notre étude des ressorts sociaux des consommations informationnelles médiatiques, notamment au travers des usages.

A. V. Cicourel nourrit un fort intérêt pour ce qui relève du processus (socio-cognitif), et pas seulement pour le résultat. L'intérêt est porté sur la manière ou l'action en train de se faire, ceci pour donner chair par exemple aux résultats macro qui laissent logiquement dans l'obscurité les variations intra-individuelles en enregistrant seulement « à froid » des pratiques déclarées au travers de questionnaires standardisés -- dont les résultats ont un intérêt de cadrage indéniable.

Dans le même ordre d'idée, plusieurs critiques sont aussi adressées : à différentes méthodes d'enquêtes dont les statistiques officielles désincarnées (Cicourel, 1964, 1968, 1981), à certaines analyses de conversation dépourvues de contextualisation et à une tendance de l'analyse micro à tourner en rond (« régression infinie »). A. V. Cicourel produit dès 1963, avec J. Kituse, ses premières critiques des statistiques officielles et du « bruit » micro que les outils calibrés pour le plan large ont tendance à écraser. Il réserve également quelques flèches aux dérives de l'analyse de conversation qui négligent le contexte, voire l'imbrication de contextes (2001, chapitre IV). Enfin, à l'autre bord, est décriée la quête d'exhaustivité dans la contextualisation, laquelle lui semble illusoire (« volonté de tout dire à propos d'un contexte quelconque » (2001, pp. 140 et 187). Le chercheur, avance-t-il, est censé bien connaître son terrain d'observation pour filtrer et décrire les éléments les plus saillants, afin d'éviter les descriptions infinies.

L'auteur étatsunien s'intéresse également au lien entre information (connaissance) et prise de décision (action). Il s'agit de saisir ce qui se joue dans l'échange conversationnel entre un patient et un professionnel de santé (ou entre ces derniers : infirmier, interne, professeur) afin qu'une décision médicale sensée soit prise. Cette décision puisera ses fondements par inférence dans un modèle associant symptômes, maladie et remède, et dont les maux typiques doivent être retrouvés lors du travail de collecte d'informations dans les déclarations et plaintes du patient (« le médecin est 'programmé' pour rechercher certaines variables, symptômes, associations, rendant possible un diagnostic rapide (...) », 1981, p. 15). À condition toutefois de s'assurer qu'aucun élément essentiel ne manque, que les mots employés par chaque partie recouvrent la même signification et que le professionnel sache trier les déclarations et comportements pour établir son diagnostic ainsi que pour le recoder sous forme de résumé médical (summary statement) destiné aux autres médecins. Pour notre recherche sur la réception des médias, la dyade est composée par le couple information-décision mais aussi par la paire information-prise de position. Le fait de questionner les usages en entretien permet de comprendre les ajustements opérés de manière itérative (matériel, posture, périmètre, contexte) qui s'appuient sur des allers-retours en matière d'expérience (physique) de consommation. On songe également à la dimension politique des déclarations (inclination partisane) qui tire en partie son fondement dans les consommations médiatiques, dont témoignent les exemples pris dans l'actualité qui agrémentent spontanément, ou après sollicitation, chaque entretien.

Un autre point de convergence concerne la réflexion menée sur l'expertise (littératie) par accumulation d'expérience, incrémentation et réflexivité. Au contact des professionnels de santé de tous les niveaux et accumulant lui-même une expérience au fil des années, A. V. Cicourel a assisté in situ à la fabrication d'un savoir et d'un savoir-faire, à une socialisation professionnelle (Baszanger, 1981). D'abord, du point de vue des connaissances mises en pratique, avec la multiplication des cas cliniques rencontrés au quotidien, ensuite, du point de vue des savoir-faire conversationnels mobilisés pour obtenir des informations médicalement exploitables. Sont ainsi comparés rétrospectivement dans le chapitre VI (2001), les entretiens menés avec une même patiente par deux jeunes médecins dont l'un parvient mieux à gérer l'échange pour se faire confirmer des symptômes et antécédents et ainsi poser un meilleur diagnostic. Dans un autre registre, l'expertise renvoie aussi à l'automatisation (système expert) et au développement de l'« intelligence artificielle » fondée sur l'accumulation de données et la conception de schèmes interprétatifs probabilistes -- lesquels ne sont pas sans poser, aujourd'hui encore, des questions de divers ordres (juridiques, techniques, professionnelles, éthiques). On retrouve cette expérience accumulée comme source de réflexion scientifique au sujet des médias, autour notamment de la notion, pas totalement stabilisée, de littératie médiatique et/ou informationnelle, sorte d'alphabétisation ou de compétences de base aidant à comprendre autant les informations que les méta-informations et les routines professionnelles sous-jacentes. Mais c'est également un aspect méthodologique auquel renvoie l'expertise et le statut du chercheur enquêtant sur des pratiques informationnelles très diverses. La maîtrise du (tout-)terrain permet à ce dernier de produire des entretiens plus précis, mettant à profit de meilleures prédispositions pour entretenir la conversation avec chaque enquêté et univers propre de pratiques -- sans que cela ne signifie pour autant une infinité de variations.

Pour en revenir aux commentaires d'A. V. Cicourel sur l'agencement micro-macro au travers notamment des statistiques, soulignons avec intérêt son approche qui cherche en définitive à « retracer les chemins par lesquels les micro-événements sont transformés en macro-structures » (Cicourel, 1981, p. 17 ; Corcuff, 2008). En cela, l'attention portée aux activités pratiques a pour fonction de remonter aux organisations sociales, dans une cheminement local-global. Aucun niveau d'analyse n'est en effet autosuffisant : « Le médecin est autorisé et obligé de transformer des micro-événements en données ayant une signification macro. Le contexte dans lequel le médecin interprète les micro-événements ou récits du patient n'est pas accessible à partir de la seule lecture de l'histoire. » (Cicourel, 1981, p. 15).

Enfin sans trop pouvoir développer ici, ajoutons également l'intérêt du professeur californien pour la mémoire, la cognition, l'attention ou la surcharge cognitive. Autant d'objets que nous questionnons sur notre terrain.

Différences

En contre-point, citons maintenant quelques différences avec notre approche.

A. V. Cicourel, en tant que sociolinguiste, s'intéresse principalement aux activités collectives, situées et langagières au sein d'organisations (hôpital, école), alors que l'essentiel de notre terrain concerne une activité plutôt solitaire et muette -- ce qui n'interdit pas les coups de sonde dans d'autres contextes collectifs et verbaux, nous y reviendrons. Aussi les chercheurs prenant pour matériau principal, voire exclusif, l'interaction orale, s'attirent souvent la critique de trop se focaliser sur l'homo verbalis (Lahire, 2012, p. 307).

Une autre différence renvoie au terrain d'observation qui chez A. V. Cicourel est professionnel et technique (médecine) alors que notre terrain, commun et non spécialisé, est largement compréhensible par le chercheur. Aucun diplôme d'étude avancée n'est en cela requis ce qui pour le cas de la santé est un atout certain. Le professeur étatsunien reconnaît d'ailleurs le fait qu'il doit s'appuyer sur des professionnels pour analyser des échanges dont certains propos techniques lui sont étrangers et lui font donc courir le risque, s'il ne bénéficie pas d'une explication de texte, d'altérer son analyse (2001, p. 208).

La place de l'ethnographie distingue aussi nos approches car elle est centrale chez A. V. Cicourel alors qu'elle est secondaire, mais pas absente, dans notre recherche. Rien d'anormal cependant puisque le professeur californien s'intéresse précisément aux interactions verbales, à la cognition située et à la communication. La problématisation (construction de l'objet) induit de fait des options méthodologiques plus adaptées que d'autres.

Enfin, citons le positionnement du chercheur vis-à-vis des enquêtés. A. V. Cicourel reste principalement en retrait et extérieur à l'échange médecin-patient, en effectuant quelques fois et après coup des entretiens, alors que par choix méthodologique, en partie contraint par nos ressources, nous sommes partie prenante (interactant) de l'échange conversationnel qui se déroule principalement à deux interlocuteurs.

Méthodes de recherche en réception du côté du public des médias

Des chercheurs ont abordé les interactions ou réceptions médiatiques collectives au foyer, en famille, dans un quartier populaire, sur la dalle, chez un coiffeur ou dans les conversations entre collègues. Plus rarement sont organisés des entretiens collectifs (focus group) ou sont financées des passations de questionnaire en grand nombre. D'aucuns ont exploité l'installation volontaire de dispositifs de pistage (tracking). Citons enfin les carnets de pratique remplis par les sujets pour retracer tout au long de la journée leurs consommations (cf. bibliographie de Goasdoué, 2012 et Le Grignou, 2003).

La méthode que nous avons privilégiée est celle des longs entretiens ouverts et à domicile. L'idée consiste entre autres à se rapprocher des conditions ordinaires des usages informationnels, moyennant au besoin des démonstrations. Le but est de questionner le contexte routinier, en évitant de multiplier les impositions de problématiques (Bourdieu, 1980) et en visant une validité écologique : « les écologies locales physiques et sociales peuvent fournir des conditions adéquates de stimulation ou de riches 'affordances' informatives » (Cicourel, 2001, p. 34). Ainsi les caractéristiques matérielles (appareil fonctionnel et mis à jour), l'offre (nombre de récepteurs dans le foyer, qualité du débit numérique ou du signal hertzien, présence alentour d'un kiosque à journaux, horaire de passage du facteur, etc.) sont autant de caractéristiques qui peuvent ne pas être évoquées en entretien ou en réponses à un sondage alors qu'elles comptent dans la suite d'arbitrages plus ou moins réfléchis qui président aux consommations routinières.

L'expression « accorder ses violons » revient donc à intégrer les variations de langage et à fluidifier les interactions verbales pour éclaircir au mieux les usages situés, sans perdre de vue en toile de fond les pratiques diachroniques, socialement différenciées entre des enquêtés hétérogènes (âge, sexe, niveau d'étude, PCS, lieu d'habitat).

Si Maria N. (66 ans, retraitée, cadre du privé puis du public) ne lisait pas la « presse gratuite » dans les transports publics, c'est parce que l'encre mal séché tâche les doigts et risque de salir les vêtements, ce qui lui importait autrefois alors qu'elle travaillait dans un métier de représentation. De son côté, Henri I. (72 ans, ingénieur retraité) déclare-t-il dans un premier temps lire Le Monde sur son ordinateur lors de ses navigations quotidiennes. Cependant au détour des échanges, questionnant plus précisément son usage du site web et ses connaissances (média, rubriques, noms de journalistes), de rapides incompréhensions nous ont poussé à tirer au clair son usage. Et l'enquêté de finir par joindre le geste à la parole en montrant son rituel sur l'écran. Il ne s'agissait pas de la page d'accueil du Monde mais de celle de son fournisseur d'accès à internet, lequel avait noué un partenariat (temporaire) avec le média pour afficher un encart contenant une courte sélection de titres et chapôs accompagnés d'un lien permettant la lecture sans abonnement. L'enquêté confirmait ainsi qu'il voyait passer quelques articles chaque jour sur cet espace et qu'il en lisait parfois par cet intermédiaire. Sans avoir la place de détailler ici la biographie de cet enquêté et l'étendue de ses pratiques, ni de mobiliser d'autres exemples tirés de nos entretiens, il en ressort que l'expression « accorder ses violons » caractérise bien l'exercice subtil de l'entretien en ce que l'échange doit permettre de restituer fidèlement des usages que l'enquêté peut, pour différentes raisons, décrire improprement ou de façon incomplète. Dans ce dernier cas : l'enquêté lit-il vraiment le Monde et depuis quand ? Fait-il partie des « lecteurs moyens » de ce média ? Sait-il situer sa ligne éditoriale générale par rapport à d'autres médias ? Que représentent les quelques articles offerts quotidiennement rapportés à l'ensemble de la production de ce média et à ses propres consommations comprises dans leur ensemble ? Que fera cet usager quand son fournisseur ne proposera plus d'articles « gratuits » ou changera de média partenaire ? Continuera-t-il à lire ce média s'il bascule ses consommations vers un téléphone mobile connecté affichant une autre page d'accueil ? etc. Pour autant, il semble vain et inutile de ratiociner à l'infini au sujet des usages fins et situés qui dans notre optique ne tendent pas à bouleverser l'ordre des possibles que les propriétés sociologiques encadrent dans leurs grandes largeurs en matière de comportement informationnel. En effet, l'éclaircissement d'un élément pris isolément n'a jamais été décisif au regard des entretiens biographiques de plusieurs heures et au regard des diverses pratiques médiatiques reconstituées. Néanmoins l'aller-retour entre réponse plus ou moins évasive et vérification, moyennant un échange direct ou plus oblique, offre des prises pour préciser les pratiques et ajuster les cordes (du violon) avec la participation plus ou moins active de l'enquêté. Ce qui peut aboutir à un autre problème lorsque l'enquêté surinvesti tente de donner du sens à tout (micro-détail, technicité, anecdotes) quitte à se perdre en conjectures en endossant de façon incontrôlée le double rôle d'enquêteur et d'enquêté. En tout état de cause, afin de parfaire les questions et anticiper leur bonne compréhension, notamment dans le cadre d'enquêtes quantitatives, A. V. Cicourel rappelle-t-il le rôle des entretiens exploratoires qui permettent de travailler de manière intensive avec un sous-échantillon pour tirer au clair les formulations (Muntanyola Saura, 2014).

Limites de l'approche cicourélienne pour sonder les usages sociaux

Pour conclure provisoirement notre lecture des écrits d'A. V. Cicourel, signalons que ce dernier propose une démarche critique et réflexive qui s'appuie notamment sur l'exercice vertueux de la discussion des travaux de ses pairs. Dans le chapitre III « interviewing » de Method and Measurement (1964), il discute longuement de la manière dont la relation d'enquête peut affecter les données, en détaillant par exemple ses différends avec Hyman & al. (1954). Dans l'ouvrage de 2001, plusieurs pages sont consacrées à The Epistemology of a Rule-Based Expert System de Clancey (1983). Partant, il s'expose en retour aux discussions sur les limites de sa propre approche concernant par exemple : une forme de positivisme quand il tente de compiler les biais de l'enquêteur en situation d'entretien ; les types de matériaux privilégiés, trop resserrés sur les énoncés aux dépens de la description des propriétés des énonciateurs ; l'importance donnée à la communication verbale et même para-verbale ou enfin le rôle quasi omniscient prêté à l'enquêteur dont l'essence interroge. En effet, cette compétence théorique, dont l'interaction verbale est en quelque sorte le terrain de jeu, reste peu discutée tant son acquisition par enseignements, expérimentations ou lectures méthodologiques, ne garantit pas une mise en pratique fluide et nécessairement couronnée de succès. Tout chercheur pourra ainsi égrener ses échecs en enquête sans prétendre pour autant ne plus jamais en rencontrer. Le chapitre III (« interviewing » 1964) renferme des commentaires pertinents et utiles, particulièrement à l'époque de leur publication eu égard aux partis pris épistémologiques des années 1960, mais ne convaincra pas totalement l'ensemble des chercheurs (contemporains) qui mobilisent les entretiens semi-directifs ou ouverts. La quête du « super enquêteur » anticipant tous les scenarios tout en étant réactif au moindre stimulus de l'enquêté peut en effet laisser songeur.

D'autres limites sont également connues comme celle évoquée plus haut au sujet du besoin d'intermédiaires experts pour analyser les échanges et notamment les termes spécifiques de la médecine (Cicourel, 2001, p. 131).

De plus, le caractère chronophage et étalé dans le temps limite aussi la portée de la méthode cicourélienne. Ce dernier, adepte de l'enregistrement, explique par exemple avoir réalisé certains entretiens plusieurs mois après le rendez-vous médical pris comme cas d'étude. Ajoutons à cela le besoin de transcrire tous les échanges, en décoder les parties techniques, puis les retravailler avec l'aide d'un professeur de médecine le seul qui pourra « départager » les erreurs d'appréciation ou les bonnes pratiques observées chez de jeunes médecins (Cicourel, 2001, p. 79).

Un manque d'épaisseur sociologique pourrait aussi être reproché au sujet des personnes enquêtées tant la focale est portée sur l'interaction située et le langage. Si le précepte est énoncé, à savoir porter attention à l'écart de position sociale entre le médecin et la plupart de ses patients, son application mériterait davantage à être suivie d'effet.

Enfin les apports micro- et macrosociologiques n'ont pas toujours un rendement analytique équivalent, en l'occurrence le micro est plutôt secondaire dans l'explication sociologique du sujet que nous traitons (les consommations d'actualités). Son intérêt réside plutôt dans l'affinage permanent du cadrage que les questionnements microsociologiques peuvent éprouver et contribuer en retour à perfectionner. En quelque sorte, l'usage situé (et verbal) est moins l'objet de notre recherche qu'un moyen auxiliaire pour donner corps à certains aspects des réalités sociales d'un autre ordre.

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10/10/2024