Table-ronde 3 du forum "Our Microbial Lives"
On assiste à un changement de paradigme au 21ème siècle : si le 19ème et le 20ème siècles avaient une vision très négative des microbes et les envisageaient sous le prisme de l’éradication, les évolutions technologiques nous montrent désormais que certains microbes « nous veulent du bien ». Le caractère bénéfique des bactéries est une vision nouvelle pour les microbiologistes médicaux.
Cette vision de l’homme microbien va jusqu’à celle de l’homme symbiotique, et l’anatomie humaine a été redécoupée grâce aux nouvelles technologies de séquençage. La co-évolution entre Homo sapiens et les bactéries commensales est telle que l’on décrit des organes dans l’organe : on parle de communautés microbiennes et d’écosystèmes.
Depuis la découverte de la pénicilline par Fleming, l’homme a engagé une course poursuite avec les bactéries : le premier en développant de nouveaux antibiotiques et les secondes en développant des résistances. Aujourd'hui, certains antibiotiques n’agissent plus sur certaines bactéries.
Les antibiotiques sont essentiels, car sans elles, les progrès de la médecine moderne (transplantation, réanimation, chimiothérapie anticancéreuse…) n’auraient pas pu se développer. Ces molécules ont toutefois un effet pervers, car elles modifient le microbiote et permettent aux bactéries résistantes de s’implanter davantage.
Allons-nous vers la fin du paradigme de l’éradication des bactéries ? En dépit du rôle de la médecine vétérinaire et de la santé animale dans l’antibio-résistance, d’une réduction massive de l’usage des antibiotiques en élevage et d’une transformation des savoirs et des pratiques de la médecine vétérinaire vers des pratiques alternatives à l’antibiothérapie, le paradigme biosécuritaire (de l’éradication) reste dominant, en réponse à la pathogénicité des bactéries et aux maladies animales. La table-ronde réunit Geneviève Héry-Arnaud (CHRU de Brest et Université de Bretagne Occidentale), Thierry Naas (Hôpital Bicêtre APHP et Université Paris-Saclay) et Nicolas Fortané (INRAE) et est modérée par Pierre-Olivier Méthot (Université de Laval).